DONNÉES CONCERNANT L'APPLICATION DE LA CONVENTION RELATIVES AUX DROITS DE
L'ENFANT
SOMMAIRE
PRÉSENTATION GÉNÉRALE
- Mise en contexte
- Objectifs du rapport
- Méthodologie et plan d'analyse
Chapitre 1
LES MESURES D'APPLICATION
GÉNÉRALES
- Les mesures législatives
- Les mécanismes structurels ou
administratifs
- La vulgarisation de la
Convention
- Les stratégies de publication du
rapport
- La définition de
l'enfant
- La
non-discrimination
- L'intérêt supérieur de
l'enfant
- Le droit à la vie, la survie et le
développement de l'enfant
- Le respect des opinions de
l'enfant
Chapitre 2
LIBERTÉS ET DROITS
CIVILS
- Le nom et la nationalité
- La préservation de l'identité
- Les libertés publiques
Chapitre 3
MILIEU FAMILIAL ET PROTECTION DE
REMPLACEMENT
- L'orientation et la responsabilité
parentales
- La séparation d'avec les
parents
- La réunification familiale
- Les déplacements et les non-retours
illicites
- Le recouvrement de la pension alimentaire de
l'enfant
- L'examen périodique du
placement
6.1.
L'adoption
Chapitre 4
SANTÉ ET BIEN-ÊTRE DE L'ENFANT
- Priorités et
objectifs
- Niveau de vie, survie et développement de
l'enfan
- La prise en charge globale de
l'enfant
- Le suivi nutritionnel et la promotion de
l'allaitement maternel
- Le programme élargi de vaccination
(PEV)
- Les programmes de lutte contre les maladies
diarrhéiques (LMD) et de contrôle des infections respiratoires aiguës
(IRA)
- La santé
scolaire
Chapitre 5
- L'éducation
1.1. Priorités et objectifs dans le secteur
1.2. Le cadre global de l'accès à
l'éducation
1.3. Les défis du système
1.4. Les progrès généraux
réalisés
- Loisirs, sports, activités récréatives
et culturelles
2.1. loisirs et activités
récréatives
2.2. Activités culturelles et
artistiques
Chapitre 6
MESURES SPÉCIALES DE PROTECTION DE L'ENFANT
- Les enfants en situation d'urgence
1.1. Les enfants réfugiés
1.2. Les enfants des
rues
1.3. Les enfants en domesticité
- Les enfants en conflit avec la
loi
2.1. L'administration de la justice pour mineurs 59
- Les enfants victimes d'exploitation............
61
3.1. La situation au travail
3.2. Les victimes de la
drogue
3.3. Les cas de violence et d'exploitation sexuelles
3.4. Les vols, ventes et enlèvements
d'enfants
CONCLUSION
RÉFÉRENCES
- bibliographie
- principaux texes législatifs cités
PRÉSENTATION GÉNÉRALE
1. Mise en
contexte
En 1994, l'État haïtien a ratifié la Convention relative aux
Droits de l'Enfant. Ce faisant, il a opté pour orienter de manière
systématique ses politiques dans le sens de l'intégration et de la
protection spéciale à accorder aux enfants qui représentent
déjà plus de 40% de la population totale du pays.1 Mais, ce choix implique aussi un certain nombre
d'engagements vis-à-vis de l'Organisation des Nations Unies dont il
est membre.
En effet, deux (2) ans après ratification de la Convention les États
parties doivent soumettre au Comité des Droits de l'Enfant, par
l'entremise du Secrétaire Général de l'Organisation
des Nations Unies, un rapport sur les mesures adoptées, les difficultés
rencontrées et les progrès réalisés, tout comme les
perspectives arrêtées en vue de rendre effectifs les droits reconnus par
cette Convention.2
2.
Objectifs du rapport
Pour le Comité des Droits de l'Enfant, l'établissement
d'un rapport constitue une bonne occasion de procéder à un examen
global des diverses mesures prises pour harmoniser la législation et les
politiques nationales avec la Convention et pour suivre les progrès
réalisés dans la jouissance des droits (). Il sert aussi à
encourager et faciliter la participation populaire et l'examen public des
politiques suivies à cet égard par le gouvernement.3
L'établissement de ce rapport devra permettre, à
l'État haïtien d'honorer ses engagements vis-à-vis de la
communauté des nations, mais l'intérêt essentiel se situe
dans la production de données et d'informations pratiques capables de
faciliter l'évaluation des interventions publiques, d'expliquer les
manquements et d'ouvrir des perspectives pour une action systématique de
l'État en matière de droits de l'enfant.
3.
Méthodologie et plan d'analyse
L'approche utilisée dans le cadre de ce rapport se veut très
analytique. Le principe fondamental qui a guidé tout le travail repose sur la
nécessité de comprendre les facteurs accompagnant chacune des
interventions publiques en matière d'application de la Convention. Ainsi,
de manière générale et pour chaque mesure adoptée, le souci
aura été de mesurer le degré d'efficacité, les
contraintes et leurs causes, les perspectives et les projets en cours
d'exécution en vue d'éliminer ces contraintes et
d'améliorer les interventions en général.
Le texte de ce rapport comporte six (6) chapitres (hors mis la présentation
générale et la conclusion) développés conformément
aux directives générales du Comité des Droits de l'Enfant.
Le premier décrit et analyse les mesures d'application
générales relatives à l'intégration de la Convention
dans la législation haïtienne, la vulgarisation, le statut de
l'enfant et les principes généraux (non-discrimination,
intérêt supérieur, droit à la vie et respect des opinions de
l'enfant).
Le deuxième chapitre se rapporte à l'analyse et à
l'évaluation des libertés publiques et des droits civils de
l'enfant en Haïti. Le troisième traite de l'environnement
familial de l'enfant et de la protection de remplacement. Les deux (2) chapitres
suivants concernent respectivement la santé, le bien-être et
l'éducation des enfants à laquelle s'ajoutent les
activités récréatives et culturelles. Enfin, le sixième
chapitre interroge les mesures spéciales de protection de l'enfant en
rapport avec la justice, la violence et d'autres formes d'exploitation dont
sont victimes les enfants haïtiens.
La conclusion présente une analyse du contexte global de mise en application de
la Convention par l'État haïtien. Elle résume plus
précisément les avancées réalisées depuis la
ratification, les difficultés et contraintes qui pèsent sur les
interventions de l'État et ouvre des perspectives pour une mise en
œuvre systématique de la Convention.
1. Les
mesures législatives
En décembre 1994, l'État haïtien a ratifié la
Convention relative aux Droits de l'Enfant et est ainsi devenu membre des Etats
parties de cette convention qui allait être publié dans le Moniteur,
Journal Officiel de la République d'Haïti le 7 juillet 1995.
Ces deux (2) faits constituent les deux actes d'intégration officielle de
la Convention à la législation haïtienne. La Constitution stipule
en son article 276-2 que "les traités ou accords internationaux, une fois
sanctionnés et ratifiés dans les formes prévues par la
Constitution, font parties de la législation du Pays et abrogent toutes les lois
qui leur sont contraires." En conséquence, toutes les dispositions de la
Convention relative aux Droits de l'Enfant ont leur plein et entier effet
par-devant les tribunaux.
Au-delà de cette intégration formelle de la Convention dans la
législation haïtienne, d'autres mesures spécifiques
d'application ont été prises. Elles concernent la mise en
œuvre de chacune des dispositions de la Convention. En ce sens, l'acte
législatif le plus important du gouvernement reste à venir et portera sur
l'adoption du CODE DE L'ENFANT.
En réalité, une proposition de loi a déjà été
présentée en 1998 par une Commission parlementaire. Mais vu
l'importance de la question, le gouvernement a préféré
mettre du temps afin d'en discuter le contenu avec la société
civile et d'harmoniser le projet avec la Convention elle-même.
L'absence prolongée d'un parlement fonctionnel est aussi une
contrainte qui a contribué à ce retard.
On reconnaîtra, cependant, qu'existe une législation haïtienne
sur la protection des mineurs. Elle remonte déjà à trente-neuf
(39) ans mais présente des faiblesses à certains points de vue par
rapport à la Convention. La Constitution du pays qui ne date que de 1987
reconnaît évidemment à l'Enfant ses droits
inaliénables.
De manière générale, la problématique de l'enfance
comme politique publique relève du domaine social, l'un des grands axes
d'intervention de l'État. Aux termes des articles 260 et 261 de la
Constitution, ce dernier doit procurer aide et assistance à l'enfance,
lesquelles sont garanties par la loi.
Dans cette perspective, la mise en application de la Convention demeure une tâche
spécifique de toutes les institutions publiques, chacune en ce qui la concerne.
Par contre, le mode d'organisation et de fonctionnement du gouvernement font de
certaines instances des pouvoirs publics la clé de voûte de toute la
politique de l'État en matière de Droits de l'Enfant. Il
s'agit du Ministère des Affaires Sociales (MAS) et de l'Institut du
Bien-être Social et de Recherches (IBESR) dépendant de ce
Ministère, des Ministères de la Justice et de la Sécurité
Publique (MJSP), de l'Éducation Nationale, de la Jeunesse et des Sports
(MENJS), de la Santé Publique et de la Population (MSPP), du Ministère
à la Condition Féminine et aux Droits de la Femme (MCFDF) et de la
Secrétairie d'État à la Jeunesse, aux Sports et au Service
Civique (SEJSSC).
Le MAS, de par sa mission de conduire la politique sociale du gouvernement, se
présente tout naturellement comme l'institution qui assure la
coordination des interventions en matière d'application de la Convention.
Une Commission de réflexion formée (en 1997) des représentants de
chacune des institutions sus-mentionnées auxquels s'ajoutent un (1)
représentant du Ministère des Affaires Étrangères (MAE) et
un (1) représentant de la Coalition Haïtienne de Défense des Droits
de l'Enfant (COHADDE) est constituée en vue d'identifier les actions
entreprises dans la mise en œuvre de la Convention.
Ce comité gère aussi un ensemble d'activités ou de projets
tels que l'organisation de la Journée Nationale de l'Enfant,
l'élaboration des Rapports de Suivi d'Application de la Convention
etc. La perspective est déjà formulée de transformer ce
Comité en une structure permanente capable d'assurer le suivi
d'application des différents aspects de la Convention.
Il est à signaler que toutes les structures gouvernementales
présentées, à l'exception du Ministère à la
Condition féminine et aux Droits de la Femme, précèdent la
Convention. Mais leur intérêt pour celle-ci les porte à initier
des programmes et des projets tout comme à créer des unités ou
directions internes chargées de mettre en œuvre chacun des aspects les
concernant respectivement. Ces efforts se fondent naturellement dans la dynamique
globale de restructuration de l'administration publique haïtienne
engagée par le gouvernement depuis 1996 4.
Faire connaître les dispositions de la Convention relatives aux Droits de
l'Enfant à la population haïtienne aura été une
priorité majeure du gouvernement eu égard à la mise en œuvre
de cette Convention. En effet, outre la publication de celle-ci dans LE MONITEUR, le
journal officiel de la République, tout un ensemble d'actions ont
été entreprises en vue de sensibiliser la nation sur les Droits des
Enfants.
L'année 1998 aura été celle de la mise en marche
irréversible du projet : l'organisation de la journée nationale de
l'Enfant et l'organisation des festivités de
célébration du Xe anniversaire de la Convention auront été
les occasions idéales à ce démarrage. Émissions de
radio-télédiffusées, affiches et spots publicitaires, graffitis,
banderoles, auto-collants etc., autant d'activités qui se poursuivent
encore aujourd'hui.
La presse écrite a aussi fait un grand écho de la question des Droits de
l'Enfant. En décembre 1998, le Ministère de
l'Éducation Nationale, de la Jeunesse et des Sports (MENJS) a
organisé une Journée des Médias en Faveur de l'Enfant
en vue de les sensibiliser eux-mêmes sur la nécessité de contribuer
au développement et à l'application de la Convention. Ce
même Ministère publie une revue trimestrielle L'ÉDUCATION
EN ACTION qui se révèle une véritable tribune pour traiter des
questions éducatives relatives aux Droits de l'Enfant.
Le Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique (MJSP) de
son côté a organisé le 20 novembre 1998 une journée de
mobilisation sur la justice et les structures d'accompagnement des mineurs. Il
édite aussi, depuis le mois d'août 1999 une revue trimestrielle,
LA MAGISTRATURE, dans les colonnes de laquelle est publié à chaque
parution un article sur la justice pour mineurs écrit par le juge des enfants.
À cela s'ajoutent des séminaires et conférences à
l'université que prononce encore ce dernier.
D'autres initiatives doivent être aussi considérées : des
articles paraissent de temps en temps dans les colonnes des Journaux, LE
NOUVELLISTE et LE MATIN, les deux principaux quotidiens du pays, sous la
plume des responsables du gouvernement.
Ces efforts du gouvernement sont appuyés par l'action des ONG nationales
et des organismes internationaux. On pourrait citer, par exemple, la publication en
français et en créole du texte de la Convention, l'organisation de
concours dont les thèmes portent sur les droits des enfants. Dans ce même
cadre, on notera les interventions de la Coalition Haïtienne de Défense des
Droits de l'Enfant (COHADDE) qui se donne même pour mission de faire
connaître la Convention à la population.
Il est difficile d'estimer aujourd'hui le poucentage de la population qui a
été réellement sensibilisé par la question du Droit des
Enfants.5 Se pose alors la question de
l'évaluation du processus de vulgarisation de la Convention
demeurée sans réponse. Cependant, d'un point de vue analytique,
l'on conviendra que l'un des problèmes est la concentration à
la capitale des médias relayant les activités décrites
précédemment. Ce problème s'aggrave du fait du faible
rayonnement de ces derniers, en ce sens qu'ils ne couvrent
généralement que l'espace de la région
métropolitaine.
Une autre difficulté majeure se rencontre dans l'inexistence d'une
politique systématique de vulgarisation de la Convention. En témoigne la
sporadicité de la plupart de ces interventions. La presse écrite, de
toute évidence, ne saurait mener loin en raison du taux très
élevé de l'analphabétisme dans le pays ; la nature des
autres activités (banderoles, grafittis etc.) indique aussi la
nécessité d'une évaluation d'impact.
Cependant, en intégrant la Convention dans le curriculun de l'enseignement
fondamental, le gouvernement a fait un choix rationnel de divulgation des droits de
l'enfant en s'adressant aux intéréssés
eux-mêmes. Ainsi, les meilleurs résultats en ce qui concerne la
sensibilisation sont à espérer.
Les perspectives de coordination et de vulgarisation systématique de la
Convention se retrouvent aussi dans le projet de rendre permanent le Comité
Interministériel des Droits de l'Enfant dont l'une des grandes
missions sera la mobilisation de la population sur cette question. En ce sens,
l'un des moyens doit être recherché dans les radios communautaires
qui se disséminent un peu partout jusque dans les milieux les plus
reculés du pays.
Tout un ensemble de scénario est prévu pour porter le rapport à la
connaissace de tous. En guise d'éléments de stratégie de
diffusion du rapport, on peut citer sa traduction en créole, sa multiplication
et sa diffusion au sein de la société civile, l'organisation de
colloques et de conférences, des émissions de radio ou de
télé et une présentation systématique dans la presse.
Le gouvernement prévoit aussi d'impliquer les opérateurs
privés, soit en rééditant l'expérience faite avec la
COHADDE, cette fois-ci en élargissant le cercle de ses partenaires à
d'autres organisations oeuvrant tant dans le domaine de l'aide à
l'enfance ou à la famille que dans d'autres secteurs de
défense des Droits de l'Homme en général et des Droits de
l'Enfant en particulier.
Il demeure entendu aussi que chacune des institutions publiques
intéressées par la question entend renseigner et motiver leurs
partenaires respectifs ne serait-ce que sur des points essentiels les concernant. Mais
là où une action d'envergure sera menée, c'est au
niveau des pouvoirs publics locaux qui jusqu'ici ne semblent pas
sensibilisés au point de se sentir concernés par la problématique
du Droit des Enfants. En ce sens, sont prévues des séances de travail
d'information avec les élus locaux, des opérateurs locaux et la
presse locale. Seront aussi touchés les responsables religieux et les leaders
de quartiers.
Dans la législation haïtienne, l'enfant est désigné
sous le vocable de mineur. En son article 392, le Code Civil haïtien
définit le mineur comme étant l'individu de l'un ou
l'autre sexe qui n'a point encore atteint l'âge de dix-huit
(18) ans accomplis. À ce stade, l'individu atteint l'âge de
la majorité civile, politique et matrimoniale. Par contre, une fille
tombée enceinte avant sa majorité peut toujours contracter mariage avec
le géniteur mais une telle situation suit à la fois le consentement ou
engage la responsabilité de ses parents et l'autorisation du
Président de la République.6
Le mineur ne peut pas ester en justice ni consulter un avocat de son propre chef.
C'est une responsabilité qui incombe à ses parents ou le cas
échéant à son tuteur. Rien ne l'empêche, toutefois,
de recourir au Protecteur du Citoyen, personnage désigné par la
Constitution et par la loi pour protéger tout individu contre toutes formes
d'abus de l'Administration.
Le Code du Travail fixe à quinze (15) ans l'âge minimum du travail
rémunéré des enfants mais l'engagement se fait avec
l'autorisation de la Direction du Travail. Cependant, selon le Code du Travail,
un enfant peut être confié en domesticité déjà
à partir de douze (12) ans avec cette foi-ci l'autorisation de
l'Institut du Bien-Être Social et de Recherches (IBESR). Celui-ci,
s'opposant de fait à la domesticité, n'en délivre
plus.
L'âge de la majorité pénale est fixé à seize
(16) ans environ. Néanmoins, les enfants de 13 à 16 ans qui commettent
des crimes et des délits sont traduits devant le Tribunal pour Enfants. Seuls
les mineurs de 16 ans sont passibles de la Cour d'Assises des mineurs.
La responsabilité pénale (condamnation) et les mesures privatives de
liberté (détention) ne frappent pas les enfants à proprement
parler. Le juge des enfants décide en ce sens, dépendamment de la nature
délictueuse ou criminelle de l'infraction commise par le mineur, de la
mesure conservatoire à adopter dans l'intérêt
supérieur de l'enfant. Dans l'un ou l'autre cas, cette mesure
se limite au placement des enfants dans un centre d'accueil en vue de les
"extirper de la promiscuité de la prison pour adultes" et ne concerne que les
enfants entre treize (13) et seize (16) ans (loi du 7 septembre 1961 sur la protection
des mineurs dévoyés ou en danger physique ou moral).
Le mineur de moins de treize (13) ans bénéficie du principe de
l'irresponsabilité pénale. Ne peuvent être prononcées
contre eux que des mesures de protection, d'assistance, de surveillance et
d'éducation. Dans le cas de la Contravention, le Tribunal de simple
police est compétent mais il ne peut prononcer qu'une admonestation ou une
peine d'amende contre les mineurs de plus de treize (13) ans.
La loi du 7 septembre 1961 stipule que, dans tous les cas, le mineur peut être
placé en régime de la liberté surveillée
jusqu'à l'âge de vint-et-un (21) ans (c'était
l'époque où la majorité était de 21 ans).
Les lois haïtiennes ne statuent pas sur la majorité en matière de
santé. Mais dans la pratique, les règles de la pédiatrie la fixe
à 15 ans.
Au plan analytique, le statut de l'enfant en Haïti paraît quelque peu
complexe, ne serait-ce qu'en rapport à la désuétude des lois
civiles et pénales existantes ou encore à l'inexistence de
structures et procédures administratives efficaces.
Le Gouvernement heureusement prend très au sérieux la question de
l'enfance aujourd'hui. Dans le projet de Code de l'Enfant,
l'idée est d'éliminer le chapitre qui traite des enfants en
services. De même, l'État haïtien projette de ratifier la
Convention 138 de l'OIT en ce qui concerne l'âge minimun et souscrit
au projet IPEC sur l'élimination du travail des enfants. L'absence
d'un parlement retarde naturellement de telles interventions.
L'État haïtien est partie de la Convention relative à
l'élimination de toutes les formes de discrimination. Ceci implique que
le principe de la non-discrimination est acquis en toute matière.
Les lois haïtiennes ne font pas de distinction entre les enfants en ce qui
concerne le sexe, la religion, l'origine ethnique, la race, la couleur et la
situation de fortune. La seule distinction entre enfants nationaux et enfants
étrangers n'altère en rien la jouissance et le respect des droits
définis par les dispositions de la Convention. La Constitution stipule en son
article 57 que les étrangers se trouvant sur le territoire de la
République bénéficient de la même protection que celle qui
est accordée aux haïtiens, conformément à la loi.
De plus, la discrimination raciale est en droit haïtien un délit puni au
terme du décret du 4 février 1981, définissant la discrimination
raciale comme étant toute distinction, exclusion, restriction, tout motif
fondé sur la race, la couleur de la peau, l'ascendance ou l'origine
ethnique ou nationale se donnant pour but de compromettre ou de détruire la
reconnaissance, la puissance et l'exercice de l'égalité des
droits de l'Homme.
Le Code Civil, établit la distinction entre les enfants nés dans les
liens du mariage (enfants légitimes) et ceux nés en dehors du mariage
(enfants adultérins). De la sorte, l'enfant adultérin ne peut pas
jouir, par exemple, de la succession de son père dont il ne porte pas le nom,
d'ailleurs. Conséquemment, il ne saurait revendiquer son droit à
l'assistance financière, donc à la pension alimentaire. Il est
marginalisé par cette législation.
En posant le principe de l'interdiction de la recherche en paternité pour
les enfants naturels, le décret-loi du 22 décembre 1944 tendait à
les priver à la fois de l'ambiance du milieu familial et des soins y
relatifs. Fort heureusement, la Constitution actuelle (1987) en son article 262
prescrit l'adoption d'un Code de la Famille qui viendra définir les
formes de la recherche de la paternité.
Il faudrait ici signaler que certaines pratiques discriminatoires liées à
la couleur de la peau (noirs/mulâtres), au niveau de la richesse
(pauvres/nantis), à la religion (catholiques/protestants/vaudouisants) etc. sont
parfois décelées au sein de la société. Il en est de
même d'une certaine forme de discrimination sexuelle de fait transmise
informellement par l'éducation tant aux filles qu'aux
garçons. Aujourd'hui cependant, le rapport à la scolarisation
féminine ou encore au statut des Femmes occupant de hautes fonctions dans la
société laisse apparaître une évolution réelle des
mentalités et surtout une prise de conscience en vue de mettre un terme à
ces pratiques discriminatoires.
Le gouvernement ne se montre pas moins sensible à ces problèmes. Le
décret du 4 février 1981 condamne toutes ces formes de discrimination
qu'il qualifie de pratiques délictueuses. Les peines prononcées
à l'encontre de ces pratiques vont du paiement d'une amende pouvant
s'élever à vint-cinq mille (25 000) gourdes jusqu'à
trois ans d'emprisonnement.
La création du Ministère à la Condition Féminine et aux
Droits de la Femme va aussi dans le sens de l'élimination de la
discrimination de genre. Ce ministère, de par sa position stratégique et
transversale dans les politiques publiques représente un témoignage
éloquent de la volonté du gouvernement de régler la question de
genre dans la société haïtienne.
Enfin, le projet de Code de l'Enfant s'inscrit dans la lignée des
projets porteurs pour l'élimination de toutes ces pratiques de
discrimination qui toucheraient les enfants.
La Constitution haïtienne prescrit un ensemble de droits dont jouissent tous les
individus sans distinction. Si à ce niveau elle ne fait pas
référence expresse aux enfants, elle se formalise aux articles 261-262
qui traitent des obligations d'aide, d'assistance et de protection de
l'État envers l'enfance. De même, ils reconnaissent que
l'enfant a droit à l'amour, à l'affection, à la
comprehension et aux soins moraux et matériels de son père et de sa
mère.
Ces prescriptions constitutionnelles sont venues pallier certaines insuffisances de la
législation haïtienne en ce qui concerne les enfants. En effet,
l'exercice de l'autorité parentale7, principe par lequel, les parents peuvent faire incarcerer leurs enfants
sans aucune formalité judiciaire met beaucoup plus en évidence le droit
des parents d'exercer leur pouvoir quasi-discrétionnaire sur leurs
enfants. Il faut cependant reconnaître que cette pratique tend à
disparaître au point où l'on n'enregistre presque plus
aujourd'hui de pareils cas.
L'institution de la domesticité par le Code du Travail, pose aussi
d'énormes problèmes au regard de l'intérêt
supérieur de l'enfant. Car cette pratique, loin de faciliter
l'épanouissement et le développement de ce dernier, l'enferme
plutôt dans une zone de non-droit où il est traité de façon
inhumaine donc sans relation à sa santé, à son éducation et
à son épanouissement.
La sensibilité du gouvernement pour la problématique des droits de
l'enfant est axiomatique. En 1999, Haïti a signé avec l'OIT un
Protocole d'Accord dans le cadre du Programme International pour
l'Élimination du Travail des Enfants.
Au tribunal pour enfants, les séances à huis-clos, la non-publication de
certaines décisions, les conseils de parents précédant celles-ci
etc. s'inscrivent dans la logique de l'intérêt
supérieur de l'enfant.
Les interventions de l'État en matière d'intérêt
supérieur de l'enfant ne se font pas dans le fonctionnement de la vie
familiale. Ce qui s'explique par la résistance des familles
elles-mêmes et la faiblesse des ressources dont dispose l'État.
Cependant, la priorité du gouvernement aura été la vie scolaire
durant ces cinq (5) dernières années. C'est en sens qu'une
aide substancielle a été apportée au secteur privé du
transport à travers tout le pays pour faciliter particulièrement les
écoliers qui vont et reviennent de l'école. Il en est de
même pour les Programmes de Cantine Scolaire (PNCS) et d'octroi de
fournitures (uniformes, livres, cahiers, plumes, crayons etc.) aux élèves
du secteur public principalement.
Les domaines tels que les allocations de crédits, le logement et la
sécurité sociale ne bénéficient pas de toute
l'attention nécessaire en raison des contraintes budgétaires qui
pèsent sur les politiques publiques. Par contre, les questions se rapportant
à l'adoption, les procédures d'immigration et le placement en
institution suivent leurs cours réguliers de traitement.
Du point de vue de la responsabilité des parents à assurer le
bien-être de leurs enfants, les lois haïtiennes sont claires. La
constitution du pays stipule en son article 261 que tout enfant a droit à
l'amour, à l'affection, à la compréhension et aux
soins moraux et matériels de son père et de sa mère. Des lois
d'application de cette prescription n'ont pas encore été
adoptées à cause évidemment des dysfonctionnements du parlement.
Néanmoins, des mécanismes existent déjà en ce qui concerne,
par exemple, le recouvrement de la pension alimentaire des enfants des familles
séparées. De même, pour permettre aux parents de faire face
à certaines obligations, la loi prévoit l'octroi d'une aide
aux familles nécessiteuses. Ce service qui existe théoriquement à
l'IBESR est doublé dans la pratique de la Caisse d'Assistance
Sociale (CAS) qui appuie très peu de familles et ceci dans des conditions
extrêmement limitées.
Quant au contrôle exercé par l'État sur les institutions
ayant la charge des enfants en matière de sécurité et de
santé, il se réalise dans le cadre du partenariat entre les pouvoirs
publics et le secteur privé.
À l'égard du principe de l'intérêt
supérieur de l'enfant se pose un certain nombre de problèmes
d'ordre législatif (inexistence de lois d'application des prescrits
de la Constitution et de la Convention), de ressources humaines (en quantité et
qualité insuffisantes), logistiques (non seulement pour les contrôles et
d'autres déplacements mais aussi de manque de centres de placement et/ou
de rééducation en matière d'administration de justice pour
les jeunes) etc. Ces problèmes viennent se greffer sur celui des ressources
budgétaires. Cette situation lourde de contraintes a obligé le
gouvernement à définir l'éducation des enfants comme
priorité depuis environ une dizaine d'années au moins.
Le droit à la vie de l'enfant est garanti tant par la Constitution et les
lois du pays.8 La peine de mort est
interdite en toute matière (Const. art. 20); la protection doit être
accordée à tous les enfants (Const. art. 261) ; l'avortement par
une femme enceinte est condamné à la réclusion pour une
période allant de trois à neuf ans (Code Pénal art. 262). De
même, les médecins, chirurgiens, pharmaciens ou autres officiers de
santé qui en auraient indiqué les moyens seront condamnés à
la peine des travaux forcés à temps (Code Pénal art. 261-1)
Des structures administratives existent en vue d'assurer à l'enfant
un environnement d'insertion capable de lui garantir sa survie et son
développement dans des conditions normales. En ce sens, deux services
essentiels à l'Institut du Bien-être Social et de Recherche : le
Service du Certificat Prénuptial, chargé d'encourager le mariage et
fournir des conseils conjugaux aux futurs conjoints, et le Service Prénatal et
Materno-Infantil dont la tâche consiste à appliquer toutes les mesures
médico-sociales capables d'assurer, d'une part, à la
mère gestante de l'enfant les conditions hygiéniques, sociales et
économiques pour poursuivre sa grossesse et de donner naissance à un
enfant sain et, d'autre part, à la mère aussi bien
qu'à l'enfant jusqu'à l'âge de
l'adolescence les conditions de vie décente et propre à une
évolution normale par la création de crèches, pouponnières,
garderies, parcs d'enfants et autres.9
L'État haïtien ne dispose pas de centres d'accueil pour les
enfants en réalité. Cela s'explique évidemment par ses
maigres moyens d'intervention particulièrement sur le plan financier.
Cependant, il developpe une stratégie qui encourage et canalise les actions du
secteur non-public dans le domaine. Au dernier rapport de janvier 2000,
l'Institut du Bien-être Social et de Recherche fait état de
l'existence (donc reconnue par l'État) de quarante-six (46) centres
d'accueil pour les enfants. L'État bénéficie de 20%
de la capacité d'accueil de chacun d'eux en vue de pouvoir placer
les enfants en situation difficile.
Pour sa survie, l'enfant a besoin d'une protection à la fois
physique et morale tout comme d'un régime de soins capable de lui assurer
son développement harmonieux. C'est aux parents ou aux personnes
légalement responsables qu'incombe la responsabilité
d'assurer aux enfants les conditions de vie nécessaires à leur
développement. Cependant, les lois haïtiennes prévoient un ensemble
d'aides aux parents (ou familles nécessiteuses)10 ne pouvant pas subvenir aux besoins vitaux de leurs enfants
ou aux enfants qui, pour une raison ou une autre, s'en trouvent privés.
En ce sens, la pension de réversion est allouée aux enfants
légitimes ou naturels des fonctionnaires décédés. Ils en
bénéficient tant que dure la minorité, et après celle-ci,
tant qu'ils sont inscrits dans un établissement d'enseignement
supérieur ou indéfiniment en cas d'incapacité totale.11 Les mêmes considérations
sont faites pour les enfants des salariés au niveau de l'Office National
d'Assurance-Vieillesse (ONA)12.
L'Office d'Assurance Accident du Travail, Maladie et Maternité
(OFATMA) accorde une assistance aux mineurs dépendant des salariés
moyennant le paiement d'un supplément de cotisation.13
Ces considérations permettent de se rendre compte de l'existence
d'un cadre législatif et institutionnel pour la prise en charge des
enfants des fonctionnaires et salariés. Mais il n'en est pas de
même pour ces enfants beaucoup plus nécessiteux dont les parents ne font
nullement partie de ces catégories. Car, malgré la formulation expresse
de son mandat d'accompagner les familles nécessiteuses en leur accordant
des subventions, l'IBESR n'a pas les moyens susceptibles de lui permettre
de s'occuper de ces groupes d'enfants. Signalons toutefois que depuis 1991
ces familles sont prises en charge par la Caisse d'Assistance Sociale (C.A.S.).
L'organisation d'une sécurité sociale systématique
figure au nombre des recommandations de la Commission Nationale pour la Réforme
Administrative (CNRA), mais ce n'est pas encore une garantie pour sa mise en
œuvre tant que les gouvernements ne l'inscrivent au nombre de leurs
priorités.
La Constitution haïtienne reconnaît et garantit à tous le droit
à la liberté d'expression en toute matière, quel que soit le
moyen utilisé (art. 28). Dans la législation du pays, mention
n'est pas spécifiquement faite de l'octroi de ce droit aux enfants
tout comme de toutes les autres libertés publiques.
Dans les faits, certaines interventions des pouvoirs publics portent l'empreinte
de cette volonté des autorités de respecter les opinions des enfants. La
séparation d'avec les parents, n'est jamais une décision
guidée par le simple intérêt objectif de l'enfant. elle
survient généralement après l'accord et consentement de
l'enfant particulièrement. L'Institut du Bien-Etre Social et de
Recherche (IBESR) et le Tribunal pour Enfants font état de leur
sensibilité pour cette question.
Le Ministère des Affaires Sociales (MAS), dans le cadre de son projet des
Points de Ralliement tient beaucoup compte de l'opinion des enfants. En ce
sens, il n'a pas décidé de l'option professionnelle des
enfants recrutés qui choisissent eux-mêmes les activités les
intéressant.
Les pouvoirs publics n'ont toutefois aucun moyen de contrôle
d'exécution ou de respect du principe dans le milieu familial
particulièrement. D'où l'impossibilité de faire une
évalution systématique de la réalité des enfants
exerçant leur droit de participer aux décisions les concernant
eux-mêmes.
À l'école la situation n'est pas moins difficile. Selon
l'enquête de l'UNICEF, plus de 50% des enfants témoignent des
difficultés qu'ils éprouvent à exprimer leurs opinions
à l'école ou à la maison.14
Sur les plans judiciaire et administratif, la législation haïtienne fait de
l'enfant un mineur sous la responsabilité des parents ou des tuteurs
légalement constitués. Cependant, certains mécanismes existent et
permettent aux enfants de solliciter l'aide de l'État par le biais
de l'IBESR (en téléphonant au 133) quand ils sont victimes de
mauvais traitements au sein de leurs familles. Le recours à l'Office de
la Protection du Citoyen est une démarche qui n'est pas interdite, car le
Protecteur du Citoyen est appelé à protéger toute personne contre
toutes les formes d'abus de l'administration publique.
Le plus grand problème auquel fait face le principe du respect des opinions de
l'enfant reste le manque de tradition de tolérance en
général dans la société haïtienne,
phénomène plus manifestement remarqué quand il s'agit de
laisser s'exprimer ou participer les enfants dans des décisions les
intéressant. Si l'on s'en tient à l'enquête de
l'UNICEF, on constatera que la situation s'améliore dans les couches
sociales aisées et s'agrave dans celles qui sont
défavorisées.
Des efforts importants sont réalisés par l'État en vue de
remédier à ce problème. La stratégie globale
s'appuie sur l'axe de la formation et de la sensibilisation des
différents intervenants auprès des enfants. Au nombre de ces efforts, il
faut citer toute la campagne menée autour de la Convention elle-même, les
conférences-débat prononcées à l'université
par le Juge des Enfants, l'intégration du module portant sur la Fonction -
Enfant au curriculum de l'École de la Magistrature, l'introduction
de la Convention au Curriculum de l'École Fondamentale et, par voie de
conséquence, à celui de la formation des maîtres etc.
La législation haïtienne s'accorde naturellement avec le principe du
droit de l'enfant à avoir un nom et à acquérir la
nationalité haïtienne.
En ce qui concerne la nationalité, la Constitution stipule en son article 11 que
"possède la nationalité haïtienne tout individu né d'un
père haïtien ou d'une mère haïtienne qui, au moment de la
naissance, n'avaient jamais renoncé à leur nationalité.
Elle peut aussi être acquise par une procédure de naturalisation."
L'article 49 du Code Civil prévoit l'octroi de la nationalité
haïtienne aux enfants abandonnés ou apatrides. Il dispose que les enfants
nés en Haïti de parents inconnus ou de parents dont la nationalité
n'a pas été établie acquièrent la nationalité
haïtienne en vertu de la déclaration de naissance faite à
l'Officier d'Etat civil.
Quant au nom, l'enfant l'acquiert dans des conditions qui dépendent
du type de filiation. Dans le cas de la filiation légitime (dans les liens du
mariage), l'enfant porte naturellement le nom de son père. S'il
s'agit de la filiation naturelle (union libre), il porte le nom du parent qui le
reconnaît le premier; si les deux le font en même temps, la coutume tranche
en faveur de celui du père.
La situation des enfants adultérins ne permet pas à ces derniers de
porter le nom de leur père si celui-ci vit dans les liens du mariage avec une
autre femme. Tandis que l'enfant né d'une femme adultère ne
peut porter que le nom du mari de sa mère sauf dans des cas de désaveu de
paternité, ce qui ouvre la voie à une procédure de divorce. Le
cas échéant, il prend le nom de jeune fille de sa mère ou peut
bénéficier de la reconnaissance de son vrai père.
Dans le cas de la filiation adoptive, l'enfant se voit accolé à son
patronyme celui de l'adoptant. S'il est adopté par un couple, il
prend le nom du mari, et s'il l'est seulement par la femme, il porte le nom
de jeune fille de celle-ci.
Les enfants abandonnés bénéficient d'une procédure
administrative qui mène à leur adoption.
Le plus grand problème auquel font face les enfants en ce qui concerne leurs nom
et prénom reste celui de l'établissement des actes d'Etat
Civil. Normalement, l'acte de naissance s'obtient à partir
d'une déclaration faite par l'un des parents de l'enfant
à l'Officier d'Etat Civil. Cette déclaration de naissance
peut être même tardive. Il faut toutefois signaler certaines
difficultés dues au mode de répartition dans l'espace des bureaux
d'Etat Cvil, à leur nombre três limité ou même à
l'inexistence de ces bureaux dans des régions plutôt
éloignées des villes. Par ailleurs la centralisation de ces bureaux au
niveau des villes les rend souvent inaccessibles à la population vivant en
milieu rural. 15 Ces gens ne laissent pas
ordinairement leurs activités pour aller en ville régler cette
formalité de déclaration de naissance quand ils ne le font pas par simple
ignorance.
La collaboration entre l'Eglise et l'État a permis de pallier cette
faiblesse du système au moment du baptême de l'enfant, tradition
fortement prisée. À ce moment, les services administratifs de la
paroisse se chargent de cette déclaration et du retrait de l'acte de
naissance de l'enfant.
Par le décret du 16 mai 1995, le gouvernement avait accordé pour une
période de cinq (5) ans la possibilité à toute personne dont la
naissance n'était pas déclarée de le faire sans avoir besoin
de suivre la procédure normale de déclaration tardive. Il est impossible
actuellement de déterminer le nombre de personnes non encore enregistrées
dans les offices d'Etat Civil. Une situation qui tend à s'aggraver
avec le nombre de plus en plus important d'enfants nés en
République Dominicaine de parents haïtiens vivant en situation
irrégulière et n'ayant de ce fait ni la nationalité
dominicaine, ni la nationalité haïtienne que la plupart de ces parents
refusent d'ailleurs.
La perspective la plus intéressante pour résoudre ce problème
d'identité se rapporte à la loi du 4 avril 1996 portant
Organisation de la Collectivité Territoriale de la Section Communale. En son
article 19 alinéa18, elle enjoint au Conseil d'Administration de la
Section Communale (CASEC) de recevoir les déclarations provisoires de naissance
et de s'assurer de leur enregistrement correct et régulier par-devant
l'Officier d'état civil compétent.
Le principe de l'identité tel que le définit la Convention
n'est pas mis en question par la législation haïtienne. En effet, le
nom et la nationalité sont déjà garantis par la loi et les mesures
administratives y relatives. Il en est de même pour l'identité
familiale.
La Constitution fait obligation à l'État de protéger la
famille qu'elle considère comme étant la base de la
société. Elle suggère même l'adoption d'un code
de la famille en vue d'assurer la protection et le respect des ses droits et de
définir les formes de la recherche de la paternité.
L'un des problèmes qui se posent au principe de la conservation de
l'identité est celui de la recherche des parents d'origine dans des
cas d'adoption internationale. Évidemment, quand un enfant haïtien
est adopté par un étranger, il ne perd pas automatiquement sa
nationalité d'origine. Mais, le problème surgit quand
l'enfant veut retrouver ses parents d'origine.
Dans les cas d'adoption consentie par ces derniers, il est tout à fait
facile de remonter à eux. Cependant, s'il s'est agi d'un
enfant abandonné la recherche se révèle impossible pour
l'IBESR qui en reçoît la demande car l'abandon d'enfant
est condamné par la loi pénale haïtienne.
Les lois haïtiennes ne font pas référence expresse aux enfants en ce
qui concerne les libertés publiques mais la Constitution, par exemple, les
reconnaît et les garantit à tous. Les seules restrictions à leur
jouissance concernent la sauvegarde de la sécurité nationale et de la
sécurité publique.
La liberté d'expression semble naturelle. Ce sont les
médias privés (radio et télévision, journaux) plus nombreux
et aussi encouragés d'ailleurs qui offrent aux enfants la plus grande
possibilité de s'exprimer même lorsque des émissions
récréatives sont diffusées de temps en temps sur la
Télévision et la Radio Nationales d'Haïti.
En ce qui concerne les droits de rechercher et de recevoir l'information,
l'État concentre ses efforts sur ce qui a rapport avec
l'école. En ce sens, chaque année, il procède à la
distribution gratuite de livres scolaires aux enfants du secteur public et accorde une
exonération des droits de douane en ce qui concerne d'autres livres
scolaires importés.
La liberté de pensée, de conscience et de religion n'est pas
limitée non plus. Cependant, dans la pratique, les enfants adoptent toujours la
religion de leurs parents.
La liberté d'association et de réunion pacifique se
réalise surtout au niveau des associations d'élèves qui se
montrent d'ailleurs très actives par rapport même aux
différentes crises politiques qui frappent de temps en temps
l'école haïtienne depuis 1986. Les seules restrictions se rapportent
aux considérations relatives à la sécurité nationale ou
à la sécurité publique.
L'exercice de ces libertés pose certains problèmes à
l'axiologie politique et législative haïtiennes. La Constitution
n'accorde le droit politique qu'aux citoyens âgés de plus de
dix-huit (18) ans inclusivement. De même en raison du principe de
l'irresponsabilité civile et pénale de l'enfant, c'est
aux parents qu'incombe la responsabilité civile. La grande question
demeure l'opérationnalité de l'idée selon laquelle les
parents seraient tenus responsables d'actes sur lesquels ils ne peuvent exercer
aucune interdiction ou aucun contrôle.
Somme toute, le respect de la vie privée des enfants et le droit
d'association pacifique de ces derniers introduit, dans ces conditions, une
difficulté pratique majeure dans la législation haïtienne.
Entre-temps, la société haïtienne ne se départit pas du
principe de l'autorité parentale ne serait-ce que dans ces aspects
renvoyant à l'exercice du contrôle des agissements délictueux
des enfants.
En ce qui concerne le droit à ne pas être soumis à la torture ni
à des peines ou traitements inhumains ou dégradants, il faut remarquer
qu'Haïti est partie de la Convention sur l'élimination de
toutes les formes de torture sur la personne humaine. Toutefois, des pratiques de
maltraitance se recensent encore dans la société et touchent
particulièrement les enfants en domesticité et les enfants vivant avec
des beaux-parents. Pour lutter contre cette situation, l'Institut du
Bien-Être Social et de Recherche a institué « SOS TIMOUN ». Il
s'agit d'une ligne téléphonique le 133, au moyen de laquelle
des enfants en difficulté ou même des témoins peuvent solliciter
l'intervention de l'Etat.
La famille représente pour l'Etat haïtien une institution de la plus
haute importance en matière de droit de l'enfant : elle est le premier
milieu d'insertion de ce dernier. La constitution la considère comme
étant la base de la société. L'Etat protège la
famille et lui garantit ses droits. Un code de la famille devra être
élaboré en ce sens. Les tribunaux et les institutions publiques de
défense et de protection des droits de la famille doivent être accessibles
gratuitement au niveau de la plus petite Collectivité Territoriale (art. 259-262
de la constitution de 1987). Toutefois, il est de la compétence de
l'Institut du Bien-être Social et deRecherches (IBESR) de pourvoir aux
moyens d'accorder cette protection à la famille et à
l'enfant.
Dans l'Etat actuel des choses, ces préoccupations législatives font
figure de formules difficilement applicables, en raison de l'inexistence ou de
l'organisation de moyens y relatifs. Les interventions de l'IBESR
apparaissent ainsi très limitées quant à l'encadrement
à offrir aux familles, au contrôle pratique du mode de vie des enfants au
sein de celles-ci.
La famille constitue l'environnement naturel d'évolution, de
développement et d'épanouissement de l'enfant. La
constitution haïtienne reconnaît à celui-ci son droit à
l'amour, à l'affection, à la compréhension et aux
soins moraux et matériels de son père et de sa mère.
Le Code Civil haïtien fixe la responsabilité des parents vis-à-vis
de l'enfant. Le décret du 12 décembre 1960 fait aux parents ou
toute personne ayant à sa charge un enfant obligation de le nourrir, de
l'envoyer à l'école, de lui assurer du loisir, un
développement mental, le droit à la parole et un traitement égal
au foyer et dans la collectivité. Le Code Pénal punit
d'emprisonnement la personne qui aura abandonné ou délaissé
un enfant dont elle a la garde. Cette peine variera selon le résultat de
l'acte et la qualité de cette personne vis-à-vis de l'enfant.16
Aucune restriction ne pèse sur les parents ou les personnes responsables de
l'enfant en ce qui a trait à leur devoir vis-à-vis de
l'enfant. Ils ont la liberté de choisir le type d'éducation
à donner à ce dernier hors mis tout ce qui est de nature à nuire
à l'évolution normale.
Aucun parent ou aucune personne ayant un enfant à sa charge n'est
autorisé à le maltraiter. Les cas de mauvais traitement, de viol ou de
toute forme de violence faite aux enfants sont punis par la loi.
L'Institut du Bien-être social et de Recherche (IBESR) est
l'instrument dont dispose l'Etat pour s'assurer du contrôle de
la vie des enfants au sein de leurs familles. Malheureusement, cette institution ne
dispose que de très faibles moyens pour exécuter les recommandations
législatives ou Conventionnelles, mandat attribué au Service de la
Protection des Mineurs de l'Institut du Bien-être social et de Recherches.
De telles interventions requièrent des ressources énormes tant du point
de vue humain, matériel, financier qu'informationnel
L'IBESR, à travers son service prénatal et materno-infantil, exerce
un minimum de contrôle sur les familles, en ce qui concerne leur état de
santé, physique et mentale, sur les mères particulièrement pour
qu'elles puissent donner naissance à des enfants sains. Il fournit ainsi
un encadrement aux mères gestantes, encadrement touchant aux conditions
hygiéniques, sociales et économiques.
A la mère ainsi qu'à l'enfant, jusqu'à
l'adolescence, les règlements prescrivent aussi à ce service
d'assurer des conditions de vie décente et propose à l'enfant
une évolution normale par la création de crèches, de
pouponnières, de garderies, de parcs d'enfants et autres.17
Dans les faits, les mesures ne s'étendent pas sur toutes les familles
à travers le territoire national, elles se concentrent à la
capitale où là encore, seule une infime minorité se
présentant à l'Institut du Bien-être Social et de Recherche,
peut en bénéficier. Cette institution ne disposant pas de moyens
adéquats pour aller à la rencontre des familles.
La séparation d'un enfant de ses parents est dans tous les cas une
solution extrême adoptée par les autorités judiciaires et/ou
l'Institut du Bien-être Social et de Recherches dans le souci de garantir
l'intérêt supérieur de l'enfant. Elle survient à
l'établissement de preuves de mauvais traitements, de crimes graves, de
viol ou d'un conflit résultant d'un comportement
répréhensible d'un parent envers un enfant. Dans la mesure du
possible, un conseil de famille participe aux délibérations et
l'enfant est alors confié à une pension, une famille
d'accueil, un centre de réadaptation ou d'hébergement, selon
le cas.18
Il existe, par contre, d'autres situations de séparation que ne
précède pas une décision judiciaire ou administrative. Ainsi, de
nombreux parents donnent – ils leurs enfants en domesticité à
d'autres familles. C'est en réalité, une solution
désespérée qu'adoptent ces familles nécessiteuses du
milieu rural, en général, dans l'espoir de voir l'enfant
bénéficier d'une certaine instruction ou d'un mieux
être voire d'une certaine ascension sociale.
Malgré l'existence de lois réglémentant la
domesticité, les enfants se trouvant dans cet état sont traités de
façon inhumaine. Cela constitue un véritable accroc aux droits de
l'enfant. Les autorités du pays en sont conscientes et travaillent
à prendre des mesures législatives et administratives capables
d'assurer à ces enfants leur intégrité et leur
dignité. Le projet de Code de l'Enfant s'inscrit dans ce cadre.
On recense également de très nombreux cas d'enfants confiés
à des proches parents quand le père ou la mère sont obligés
de migrer pour des causes économiques essentiellement L'inverse aussi se
produit quand les parents vivant à l'étranger retournent leurs
enfants en Haïti pour des raisons diverses.
Les situations les plus complexes de séparation des enfants d'avec leurs
parents sont celles qui surviennent à la suite d'un divorce ou à la
suite de l'incarcération de l'un des parents. Normalement, la loi
n'interdit les contacts ou rapports avec le ou les parents que dans des
conditions faisant valoir le principe de l'intérêt supérieur
de l'enfant (parent arriéré mental, de moralité douteuse,
ayant perpétré un viol sur la personne de son enfant etc.).
Dans le cas du divorce, la loi confie généralement la garde des enfants
à la mère. Par décision judiciaire, le temps de visite par
l'autre parent est fixé et permet à l'enfant de rester en
contact avec celui-ci. Toutefois, la célérité mise par le juge
des référés à prononcer la garde de l'enfant ne
facilite pas toujours la prise en compte de l'intérêt
supérieur de l'enfant tout comme de son opinion.
La séparation pour cause d'incarcération d'un parent nuit
naturellement à l'enfant. Cependant, le pont entre la famille et la
prison permet à l'un et à l'autre de rester toujours en
contact soit par des visites, soit par la correspondance. En ce sens a
été créé, au sein de l'IBESR le Service Social
Pénitenciaire ayant pour mission d'encadrer à la fois les
prisonniers et leur famille.
La séparation pour cause d'exil, d'expulsion ou de
déportation est dans tous les cas un accroc au droit à la
sécurité. La législation haïtienne en vigueur nie ces
pratiques quand la Constitution en son article 4 stipule qu'"aucun individu de
nationalité haïtienne ne peut être déporté ou
forcé de laisser le territoire national, pour quelque motif que ce soit"
La réunification familiale est perçue par l'Etat de la
manière la plus favorable pour autant qu'elle permette à
l'enfant de retrouver son environnement naturel qu'est sa famille.
Cependant, dans le cas des familles séparées à la suite du
départ des parents pour l'étranger, la réunification
familiale suit les procédures régulières
d'émigration, par rapport à Haïti, et d'immigration du
pays hôte.
L'État haïtien ne fait, de son côté, aucune opposition
à ce que des enfants rejoignent leurs parents résidant à
l'étranger ou encore établissent des contacts avec eux. Cependant,
en termes d'accords bilatéraux, rien n'a été vraiment
signé avec d'autres pays pour faciliter la réunification familiale.
Seules existent des déclarations de principe entre les Etats Haïtien et
Dominicain en ce qui concerne le rapatriement des enfants haïtiens qui vivent
outre frontière avec leurs familles.
L'octroi de visas à des enfants étrangers par l'État
haïtien dans la perspective de réunification familiale se fait sans aucune
difficulté. Cependant, en vertu du principe d'accompagnement obligatoire
récemment adopté par le Ministère des Affaires Sociales (MAS),
l'enfant qui sort ou rentre au pays doit être accompagné d'une
personne dûment mandatée. C'est une mesure adoptée pour
empêcher le trafic des enfants et les déplacements illicites. Quant aux
situations de demande d'asile par un enfant étranger,
l'administration n'en a enregistré aucun cas.
La Constitution du pays, en son article 41-1, stipule qu'"aucun haïtien
n'a besoin de visa pour laisser le pays et y revenir". Elle lui reconnaît
ainsi le droit de se déplacer librement.
Les déplacements et non-retours illicites d'enfants suivent naturellement
la ligne de la réunification familiale de fait. Et, bien souvent ce sont des
actions qui trompent la vigilance des autorités du service national haïtien
d'immigration et qui cherchent à contourner les procédures
d'immigration à l'étranger jugées trop longues par les
parents.
Les autres cas d'émigration illicite concerneraient les pratiques de vol
ou de commerce d'enfants haïtiens à l'étranger. Mais
aucun cas n'aura été enregistré sinon des rumeurs qui ont
porté le Ministère des Affaires Sociales à interdire tout
déplacement d'enfants haïtiens vers un pays étranger si ce
n'est avec un parent ou une autre personne dûment responsable.
Quand la vigilance des autorités d'immigration du pays hôte
n'a pas été trompée et que s'ensuit le rapatriement,
l'Office National de la Migration (ONM) se charge de l'encadrement et de la
réinsertion des rapatriés.
Les divorces donnent lieu à des situations de séparation où le
plus souvent les enfants se séparent de leur père. Ce dernier leur doit
une assistance financière susceptible de leur garantir leur survie et leur
développement. Cette assistance est bien souvent fixée par
décision judiciaire si l'on excepte les cas de règlement à
l'amiable.
Le décret du 4 septembre 1983 fixe les modalités d'allocation de la
pension alimentaire et condamne à une peine d'emprisonnement tout parent
qui se serait soustrait de cette responsabilité vis-à-vis de ses
enfants. En ce sens, elles sont nombreuses les décisions judiciaires qui se
prennent pour obliger les parents à accorder au moins des créances
d'aliment à leurs enfants. Lorsque ces parents se trouvent à
l'etranger, la procédure suit le canal du consulat du pays hôte
où ils résident.
Aucun problème ne se pose des points de vue administratif et légal pour
recouvrer la pension alimentaire de l'enfant. La complication à cet
égard réside dans un certain nombre de problèmes pratiques tels
que le chômage ou l'inexistence de domicile de ces parents. De
manière générale les parents ayant la garde de leurs enfants
méconnaissent les droits de ceux-ci à une créance d'aliment.
Aux termes de la loi haïtienne tout enfant victime de mauvais traitement au sein
de sa famille a droit à une protection de remplacement consistant à le
placer dans un centre d'hébergement, une pension, un centre de
réhabilitation ou une famille d'acceuil.
Avec la disparition des centres publics, ces enfants pris en charge par l'IBESR
sont confiés à des oeuvres sociales privées fonctionnant
après l'obtention d'une autorisation formelle de l'IBESR.
Ce placement est périodiquement examiné par l'Institut du
Bien-être Social et de Recherches à travers le Service Prénatal et
Materno-Infantil et celui des Oeuvres Sociales. Les inspecteurs de ce dernier Service,
munis de leur carte d'identification sont autorisés à :
- Visiter sans avertissement préalable toute maison d'enfants
placée sous son contrôle;
- Consulter tout livre, registre ou document dont la tenue est prévue par les
règlements généraux et d'en vérifier la
conformité avec les prescriptions légales;
- Procéder à tout examen, contrôle et enquête
nécéssaires pour s'assurer de l'observance des
règlements internes de l'institution.
Ce sont là des activités qui existent antérieurement à la
Convention. Certes, elles ne sont pas réalisées dans des conditions
optimales mais elles permettent d'exercer un certain contrôle sur les
maisons d'enfants ou toute autre oeuvre sociale d'encadrement des enfants.
Ces services souffrent de manque de ressources humaines tout comme de logistique. Ce
qui limite les actions des inspecteurs. On signalera également le
problème de la limitation des interventions au niveau de l'aire
métropolitaine de la capitale. Tout cela s'explique par la faiblesse
relative de l'allocation budgétaire de l'Institut et aussi par
l'inexistence d'un plan directeur en matière de politique en faveur
des enfants.
L'adoption est un acte prévu par la loi et fait l'objet de toute une
procédure. Le service d'adoption de l'IBESR est chargé
d'examiner toutes les requêtes d'adoption et de remplir les
formalités nécessaires. L'Etat l'autorise toutes les fois
qu'elle permet de sauvegarder l'intérêt supérieur de
l'enfant. D'une manière générale, sa grande valeur
pratique réside dans le fait qu'elle assure à l'enfant les
soins nécessaires à son développement harmonieux.
On est en train d'oberver aujourd'hui une tendance à une très
forte augmentation des cas d'adoption d'enfants par des étrangers
comparativement au nombre plutôt réduit d'adoptions intrafamiliales
(dans le cadre national). En effet, pour la période 1994-1999, le service
d'adoption de l'Institut du Bien-être Social et de Recherches a
enregistré trois cent trente-huit (338) cas d'adoption intrafamiliale pour
deux milles quatre vingt-dix-sept (2097) à l'étranger. Les
adoptions au niveau national sont réalisées dans le groupe
d'âge de dix (10) à quinze (15) ans tandis que celles
enregistrées à l'étranger se situent dans le groupe
d'âge de un (1) à trois (3) ans.
L'adoption est régie par le décret du 4 avril 1974.19 Elle crée entre une personne et un
enfant qui n'est pas le sien biologiquement un lien juridique analogue à
celui qui résulte de la paternité et la filiation. Elle est
autorisée à l'égard des mineurs de moins de 16 ans ; toutes
les fois qu'elle est fondée sur de justes motifs qui présentent des
avantages actuels et certains pour l'adopté. L'adoptant doit
être âgé de plus de 35 ans ; entre l'adoptant et
l'adopté, la différence d'âge doit être de 19
ans. S'il s'agit de l'enfant de l'un des époux la
différence d'âge minimum est fixée à 10 ans ; le cas
échéant, le Président de la République accorde une dispense
qui la réduit.
Les adoptants ne devront avoir au moment de l'adoption ni enfants, ni
descendants. L'adoption engendre les même droits et les mêmes
obligations que ceux dérivant de la filiation naturelle et légitime.
Le processus d'adoption ne présente aucune difficulté en ce qui
concerne les étapes légales. Deux (2) problèmes essentiels se
posent toutefois au service : le contrôle à l'étranger qui
pourrait se faire par les consulats d'Haïti et la recherche des parents
biologiques des enfants abandonnés.
Dans le cas des adoptions consenties par les parents biologiques, la recherche se fait
sans problèmes. Mais quand il s'agit d'un enfant abandonné le
processus est bloqué dans les conditions actuelles où l'IBESR ne
peut que lancer des appels à reclamation qui restent toujours sans
réponse.
Le phénomène d'abandon d'enfants est aujourd'hui en
pleine expansion. L'une des explications à ce problème doit
être recherchée d'une part, dans la sanction négative de la
société qui considère comme une marâtre celle qui aurait
abandonné son enfant, d'autre part, - et c'est là,
l'aspect le plus important, - dans l'incapacité économique de
ces mères d'assurer la subsistance de leur progéniture. Dans
certains cas, l'enfant abandonné aura été un enfant
non-désiré.
Le code pénal voit dans l'abandon un crime qu'il punit
d'ailleurs. Lorsque l'enfant est abandonné à
l'hôpital, un certificat d'abandon précède sa prise en
charge par l'IBESR. Dans le cas de l'abandon de rue, le juge de paix
dresse un acte d'abandon.
Au regard des grandes missions de l'État, la santé en Haïti
relève du secteur de cohésion socio-culturelle. La constitution du pays
stipule que "l'État a l'impérieuse obligation de garantir le
Droit à la vie, à la santé à tous les citoyens."
La législation traitant spécifiquement de la santé des enfants
n'a pas l'air d'être très abondante. Elle porte
particulièrement sur l'allaitement maternel (congé de
maternité de 12 semaines, disposition d'une pause de 30 minutes sur la
journée de travail etc.).20 La
femme enceinte sous le coup d'une peine d'emprisonnement peut
bénéficier d'un sursis dû à la protection de
l'enfant qu'elle porte ; ce dernier s'applique aussi à la
mère délinquante allaitant un enfant de moins de six (6) mois.21
Sur les plans stratégique et administratif, l'instance étatique
chargée de l'organisation ou de la gouvernance du système de
santé en Haïti est le Ministère de la Santé Publique et de la
Population (MSPP). Structure centrale, elle s'appuie sur dix (10) Directions
Centrales et dix (10) Directions Départementales déconcentrées
relayées au niveau communal par un bureau.
Ce secteur suit, comme bien d'autres, la mouvance globale des réformes
engagées dans le sens de la modernisation de l'État. De la sorte,
tout un ensemble de projets de loi est déjà élaboré et
attend d'être ratifié par le parlement. Il s'agit notamment
du projet de loi organique du MSPP, de la loi-cadre sur les hôpitaux et sur la
pharmacie, la loi sur la commercialisation des substituts du lait maternel. Leur
ratification répondra au besoin d'actualisation des structures et de la
législation dans le domaine.
Le Ministère de la Santé Publique et de la Population poursuit trois (3)
objectifs principaux du point de vue de la Convention :
- améliorer l'état de santé de l'enfant haïtien;
- réduire la morbidité et la mortalité infantile causées
par les infections et les maladies immuno-controlables;
- faire participer la communauté aux actions de protection et de promotion de la
santé des enfants et adolescents.
Au nombre des priorités, figurent l'offre de soins intégrés
de qualité aux enfants, la lutte contre la diarrhée et les infections
respiratoires aiguës, le contrôle de la croissance, la prévention de
l'anémie, de la xérophtalmie et du goître, la promotion de la
santé intégrale des adolescents, la promotion et la prévention des
IST/SIDA chez les jeunes, la prévention de la transmission mère-enfant du
VIH/SIDA, l'éradication de la polio et l'élimination de la
rougeole, le contrôle du tétanos néo-natal et de la
méningococcémie, la sensibilisation de la population, le
développement de la collaboration multisectorielle etc.
En vue de donner forme à toute cette perspective, le MSPP a créé
le Service de Santé Infantile appuyé par les Sercives de Nutrition, de
Santé Scolaire, de Santé de la Reproduction etc. Un Plan
Stratégique National de Prise en Charge Globale de l'Enfant (1997-2000) et
des Plans Opérationnels Annuels ont été aussi
élaborés.
Plusieurs programmes et projets sont réalisés dans le même esprit :
la Prise en Charge Intégrée des Maladies de l'Enfance (PCIME), la
relance de la Santé Scolaire, la Distribution de Médicaments Essentiels,
la Production Locale de Sel Iodé, le Contrôle de la diarrhée et des
Infections Respiratoires Aiguës, la Promotion de l'Allaitement Maternel et
l'Initiative Hopitaux Amis des Bébés (IHAB), la Surveillance
Sentinelle, l'Introduction de nouveaux antigènes dans le programme
national de vaccination, la mise en œuvre du Plan Stratégique National de
Communication pour la Santé etc.
L'une des faiblesses de ce Plan Stratégique National de prise en charge
globale de l'enfant aura été de négliger un bon nombre
d'enfants n'ayant pas moins besoin de recevoir des soins spéciaux.
Ce sont en particulier les enfants handicapés. Il n'est pas possible
actuellement d'affirmer l'existence d'une politique clairement
définie en ce qui concerne ces handicapés. Cependant, les œuvres
privées qui les encadrent bénéficient de l'encouragement et
de l'appui financier de l'État. Mais de si faibles interventions ne
sauraient répondre à leurs grands besoins en services de tous genres.
Toutefois, six (6) recommandations ont été faites aux pouvoirs publics
par le "Colloque sur l'intégration/réintégration
des personnes handicapées" réalisé au début du mois de
décembre 1999 sous le patronage du Ministère de l'Éducation
Nationale, de la Faculté des Sciences Humaines et de l'Université
Quisqueya :
- la prévention de l'incapacité, à travers la
vaccination, la nutrition, la détection précoce et l'intervention
au moment opportun de façon à minimiser les risques
d'incapacité;
- la sensibilisation de tout le personnel de santé à
l'intervention précoce dans les hòpitaux du pays;
- la création de départements de réhabilitation
médicale dans les principaux hôpitaux du pays;
-
l'accès à tous les services de santé pour toutes
les catégories d'incapacité;
- la subvention pour l'acquisition de prothèses et pour des
interventions médicales ou des services spécialisés;
- la subvention aux médicaments, en particulier ceux qui doivent
être pris en permanence comme dans les cas d'épilepsie.22
Le plan stratégique de prise en charge globale de l'enfant pour la
période 1997-2000 vise avant tout la réduction de la morbidité et
de la mortalité infantile. Par définition même, le plan consiste
en une démarche de prise en charge simultanée d'un ensemble de
pathologies qui, dans leur association constante, sont à l'origine de la
morbidité et de la mortalité chez les enfants, particulièrement
dans le groupe d'âges 0-5 ans.
Chaque année, environ 138 000 enfants de moins de cinq (5) ans meurent.
Soixante pour cent (60%) de ceux qui survivent ne grandissent et ne se
développent pas normalement.23
Les causes de la mortalité chez les enfants entre un (1) mois et cinq (5) ans se
recensent généralement parmi les maladies telles que la diarrhée
(26-28%), les IRA (20%) et la malnutrition (32%).24
Ces données n'infirment pas, par contre, les progrès
réalisés dans la réduction de la mortalité infantile qui a
diminué de 150 à 74 pour mille durant les vingt (20) dernières
années. Le plus fort taux de réduction s'observe au cours de la
période 1987-1993.25
Le gouvernement haïtien ne reste pas insensible aux affections que risquent ou
dont sont victimes les enfants d'Haïti. Le MSPP a intégré la
Prise en Charge Globale de l'Enfant (PCGE) dans le Paquet Minimal de Services
(PMS) devant être disponible à tous les niveaux de soins. En 1997,
Haïti a rejoint le groupe de pays qui développe avec l'OPS/OMS,
l'UNICEF et l'USAID, une approche intégrée de
l'implantation de la Prise en Charge Intégrée des Maladies de
l'Enfance (PCIME), une composante de la Prise en Charge Globale de
l'Enfance (PCGE).
La mise en oeuvre de la PCIME en Haïti repose sur les trois composantes
suivantes:
- l'amélioration des compétences du personnel de
santé par l'élaboration et la diffusion des normes, standards et
directives pour la prise en charge intégrée des cas et
l'exécution d'activités visant à en promouvoir
l'application : le MSPP a sollicité et obtenu le support de la
coopération bilatérale pour le renforcement du système de
santé. Un programme de communication pour la santé infantile en
collaboration avec l'OPS/OMS est en train d'être
développé, 246 personnels ont été formés dont 61
formateurs et 185 prestataires de services répartis dans cinq (5)
départements sanitaires;
- l'amélioration du système de santé,
nécessaire à une prise en charge efficace des maladies de
l'enfant : ce volet a reçu, dans le cadre de la coopération
bilatérale et multilatérale, des médicaments et des
équipements;
- l'amélioration des pratiques familiales et communautaires avec
les interventions de l'Unité de Communication Sanitaire qui a conçu
et élaboré des matériels d'information et de communication.
En juin 2000, à l'occasion de la Journée Nationale de
l'Enfant a été lancée, en Haïti, l'Initiative
Régionale des Enfants en Bonne Santé. Le défi consiste à
éviter environ 8000 décès d'enfants de moins de cinq (5) ans
d'ici décembre 2002.
Les activités déjà mentionnées plus haut sont actuellement
en cours pour tester et implanter chacune de ces composantes du PCIME. Les normes et
standards sont déjà disponibles et ont fait l'objet d'une
évaluation en mars 1998. Le staff du MSPP tant au niveau central qu'au
niveau intermédiaire participe depuis septembre 1997 à des ateliers
internationaux afin de pouvoir servir de facilitateurs durant les sessions à
venir de formation de formateurs. Les premières étapes pour
l'adaptation à la situation locale du matériel
générique pour la PCIME sont terminées.
Les rapports de supervision font état d'une amélioration
générale de la santé des enfants dans le pays. Ce qui
s'explique naturellement par l'augmentation et la systématisation
des offres de services. Le rapport EMMUS III, en préparation, devra permettre
de confirmer ces informations.
Les contraintes financières, cependant, conduisent à un certain blocage
des processus. En effet, il a été constaté que ceux qui
intègrent le mieux le programme sont ceux ayant participé à une
formation y relative. Inversément, ceux qui n'ont pas
bénéficié de cette formation ralentissent le rythme des
avancées. Le manque de moyens financiers ne permet pas de développer des
programmes de formation : les engagements internationaux envers Haïti ne sont
tenus que partiellement (les dons) et l'absence de parlement ne facilite pas ou
encore limite les procédures de prêts du gouvernement.
A partir de mai 1994 et avec la collaboration soutenue de l'OPS/OMS et de
l'UNICEF, le MSPP a pris l'initiative de démarrer le nouveau
programme de promotion, de protection et d'appui à l'allaitement
maternel. En août 1995, la campagne nationale de promotion de
l'allaitement maternel exclusif jusqu'à l'âge de 6 mois
est lancée avec pour objectif de faire passer la prévalence de 0,6%
à 30% en 1997. Moins d'un an après le démarrage de la
campagne, 32,7% des hôpitaux du pays dans 7 départements avaient
déjà adhéré à l'Initiative Hôpitaux
Amis des Bébés (IHAB). Plus de 2 000 prestataires de services de
santé ont été formés et un peu plus de 1 000 promoteurs
circulaient dans les communautés pour encourager la pratique de
l'allaitement.
Les résultats de cette approche sont prometteurs : dans les zones où la
promotion, la protection et l'appui à une réduction de 50% de la
mortalité infantile ont été enregistrées,
l'hospitalisation secondaire à la déshydratation
sévère a diminué de façon spectaculaire voire
complètement disparu et la malnutrition infantile est pratiquement inexistante.
Cela signifie que, chaque année, la mort d'environ 10 000
bébés serait évitée. De même, diminuerait de
façon très significative la prévalence de la malnutrition.
Le MSPP et ses partenaires cherchent à intensifier la coordination, à cet
effet des équipes de formateurs départementaux ont été
constituées, certaines structures telles que le Comité National de
Promotion de l'Allaitement Maternel26 doivent être redynamisées ainsi que le suivi des hôpitaux
devenus amis des bébés, la recherche du support de la presse et le
recrutement de nouveaux hôpitaux « Amis des Bébés ».
Une évaluation de sept (7) des hôpitaux Amis des Bébés est
actuellement en cours.
L'application de la nouvelle politique nationale de nutrition choisissant la
promotion de l'allaitement maternel, comme une des statégies principales
pour l'amélioration de l'état nutritionnel, représente
un atout supplémentaire vers l'accomplissement de l'objectif
d'une prévalence de 30% d'allaitement maternel exclusif au cours des
six premiers mois de la vie.27 En plus
du contrôle de la croissance de l'enfant, la nouvelle carte de santé
permettra de suivre son développement psycho-moteur.
La couverture vaccinale reste faible. Cela s'explique par plusieurs raisons.
Par exemple, l'absence d'activités de vaccination
journalières dans beaucoup de centres de santé, la diminution des
activités de vaccination communales (journées communales de vaccination),
et les difficultés du niveau périphérique (centres et postes de
santé) pour s'approvisionner en intrants.
Selon le même rapport EMMUS II, cité antérieurement, les taux de
couverture vaccinale des enfants de 12-23 mois se présentaient comme suit : BCG
(73%), DTP (41%), Rougeole (48%). Le pourcentage d'enfants complètement
vacciné (c'est-à-dire qui ont reçu le BCG, la Rougeole les
trois doses de DTP et de Polio – non compris Polio O) était de 30,2% pour
les enfants de 12 à 23 mois et de 18,7% pour les enfants de moins d'un
an. Un enfant sur 5 âgé de 12 à 23 mois et un enfant sur 4
âgé de moins d'un an n'ont reçu aucun vaccin.
En 1999, par contre, la couverture vaccinale nationale par antigène pour les
enfants d'un (1) an est respectivement de 85.5% pour le BCG, 81.4% pour la
Rougeole, 66.1% pour le DTP3 et de 59.6% pour la Polio3. Il est encourageant de noter
que le taux moyen pour les différents antigènes est
généralement supérieur à 50%. L'objectif national
est d'atteindre et de maintenir des couvertures vaccinales supérieures
à 80% pour les antigènes BCG, Polio, DTP3 et rougeole chez les enfants de
moins d'un (1) an et pour le tétanos toxoïde chez les femmes
enceintes d'ici décembre 2000.
Aucun cas de rougeole n'a été enregistré en Haïti
depuis 1995 mais en mars 2000 quelques cas ont été recensés dans
l'un des départements sanitaires et l'épidémie a
gagné du terrain. Néanmoins, le calcul de la population susceptible
à la rougeole depuis la campagne de 1995 montre une accumulation
accélérée, avec un total estimé de plus de 600 000 enfants
de moins de cinq ans non immunisés. Ceci est principalement le résultat
de la faible couverture vaccinale atteinte depuis la campagne à travers les
activités de vaccination routinière, qui est de l'ordre de 30%.
Avec la flambée de rougeole, le MSPP a été porté à
utiliser la stratégie de vaccination porte-à-porte dans les écoles
et dans des postes communautaires.
Il est important de se souvenir que l'absence de cas de rougeole n'est pas
synomyme d'élimination de la rougeole. Ainsi, la vaccination
accélérée des enfants de moins de cinq (5) ans contre la rougeole
s'avère une haute priorité. Immuniser au moins 95% de cette
population à risque boucherait effectivement le ''trou
immunitaire'' qui s'est développé depuis la fin de la
campagne d'élimination.
Toutefois, cette activité doit tenir compte des circonstances et
priorités du PEV. Elle est actuellement soigneusement préparée
pour contribuer à une relance du programme en général, et pourrait
inclure d'autres antigènes en dehors de la rougeole, pour lesquels la
couverture est également absolue pour le Gouvernement et tous les intervenants
en santé y compris et surtout les familles et les communautés.
Une évaluation du PEV a été réalisée en mars-avril
2000. Le rapport inclut un plan d'action pour cinq (5) ans pour lequel une
mobilisation de ressources est amorcée. Des antigènes jusqu'ici
disponibles dans la pratique privée (rubéole, hépatite B etc.)
seront bientôt introduite dans le PEV national. Par ailleurs,
l'installation et le maintien de la chaîne de froid (formation de
technicien, dotation d'équipements etc.), la révision des normes du
PEV (la vulgarisation de ces dernières devra suivre) etc. sont autant
d'interventions importantes réalisées par le MSPP.
En Haïti, les maladies diarrhéïques, les IRA et la malnutrition
constituent les principales causes de morbidité et de mortalité
infantiles. Selon les données du service de pédiatrie de
l'Hôpital de l'Université d'État
d'Haïti (HUEH), les principales causes d'admission en 1995
étaient la prématurité (23%), la pneumonie (16%), la malnutrition
(8%), la méningite (8%), la typhoïde (6%) et la gastro-entérite
(5%). En 1996, la pneumonie a pris la première place avec 19,3% des
hospitalisations pédiatriques pour diminuer en 1997 où elle n'a
représenté que 12% des hospitalisations.
Ces différentes pathologies surviennent en général en association
chez le même enfant comme l'ont démontré depuis 1982 les
études faites à la salle de réhydratation de l'HUEH.
Au cours des vingt dernières années, des programmes verticaux et
spécifiques tels que la lutte contre les maladies diarrhéïques, le
contrôle des infections respiratoires aigues, la surveillance de la croissance,
le programme élargi de vaccination, ont eu des résultats positifs, sur la
morbidité et la mortalité dues à ces maladies. La chute
spectaculaire de la mortalité infantile entre 1987 et 1994 est sans nul doute
à attribuer en grande partie aux succès de la lutte contre les maladies
diarrhéiques et du PEV. La thérapie par réhydratation orale a
fait du chemin et le marketing social du sérum oral bénéficie de
l'appui du MSPP. Le défi actuel est de ne pas perdre le
bénéfice de ces acquis tout en les intégrant dans la prise en
charge des maladies de l'enfant (PCIME).28
La santé à l'école haïtienne représente pour les
Ministères de la Santé et de l'Éducation l'une des
priorités dans le cadre du Programme National de Santé Intégrale
des Adolescents et des Jeunes. Trois (3) aspects principaux : la prise en charge de la
santé sexuelle des jeunes par la prévention (par l'information et
l'éducation) et le traitement des MST, l'immunisation des
élèves (par l'institution de la carte de vaccination), d'une
part, et la nutrition (par l'institution du Programme National de Cantine
Scolaire, PNCS), d'autre part.
Ces programmes se déroulent dans des conditions normales.
L'État haïtien reconnaît et garantit le droit à
l'éducation de tous les enfants. La Constitution du pays prescrit la
scolarisation massive (art. 32-2), responsabilité de l'État
lui-même et des Collectivités Territoriales (art. 32-1). Outre la
constitution, Haïti a adhéré à nombre de Conventions ou de
Déclarations internationales dont la conférence Mondiale sur
l'Éducation pour Tous, la Résolution des Ministres de
l'Éducation de la Caraïbe et de l'Amérique Centrale
(PROMEDLAC) et le Cadre d'Action de Dakar (l'Éducation pour tous :
tenir nos engagements collectifs).
Depuis 1987, d'importants et constants efforts sont engagés dans le
secteur de l'éducation. Cependant, la situation politique
caractérisée par une instabilité chronique n'a jamais permis
à l'État d'intégrer toutes les recommandations et de
respecter toutes ses obligations vis-à-vis de la nation en matière
d'éducation.
À partir du mois de décembre 1993, le gouvernement s'est
engagé de manière irréversible dans l'élaboration du
PLAN NATIONAL D'ÉDUCATION dont l'objectif aura été de
fixer avec tous les partenaires de l'éducation de la société
civile et du monde économique les grandes orientations du système
éducatif et d'identifer les instruments à mobiliser pour les
réaliser efficacement.
En 1996, une première version du Plan National d'Éducation est
sortie. Mais, c'est en 1998 que ce Plan communément appelé Plan
National d'Éducation et de Formation (PNEF) a été
officiellement publié par le Ministère de l'Éducation
Nationale, de la Jeunesse et des Sports (MENJS). Ce plan définit les politiques
et les priorités du Gouvernement pour les dix (10) années à venir
et décrit les objectifs, la stratégie, les programmes prioritaires et les
principaux projets appelés à fonder l'action de l'État
dans le domaine de l'éducation.
Le PNEF définit quatre (4) grands domaines d'intervention prioritaires de
l'État : l'accès, la qualité, la gouvernance et
l'efficacité externe.29
Du point de vue de l'accès à l'éducation,
l'accroissement de l'offre constitue l'objectif du gouvernement.
L'expansion de l'offre publique d'éducation s'inscrit
dans la perspective de l'universalité d'accès pour les
enfants de 6 à 11 ans à l'horizon 2010. Un choix de discrimination
positive s'opère en faveur des milieux ruraux par l'implatation de
nouvelles écoles publiques et le soutien aux initiatives d'auto-promotion
sociale locale qui vont dans le sens d'un accroissement de l'offre
scolaire.
Du point de vue de la qualité de l'éducation,
l'amélioration de l'encadrement offert aux élèves tant
du secteur public que privé en mettant l'accent sur les connaissances, les
méthodes et les valeurs à acquérir supporte l'objectif du
gouvernement.
En ce qui a trait à l'efficacité externe, le gouvernement entend
promouvoir l'articulation entre l'éducation et la production par le
biais de l'adaptation des programmes aux besoins du milieu et à ceux du
pays, de la valorisation de la productivité et de la formation technique et
professionnelle liée aux besoins des milieux productifs avec des
débouchés vers le monde du travail.
Concernant la gouvernance, le gouvernement veut améliorer
l'efficacité dans la gestion du secteur éducatif, renforçer
les capacités institutionnelles du MENJS moyennant des stratégies de
décentralisation et de déconcentration de ses structures et de
l'ensemble du sytème, ouvrir l'école à la
communauté en fondant des mécanismes de participation sociale dans les
définitions de la vie scolaire.
À un niveau plus spécifique, le PNEF poursuit les objectifs
majeurs suivants:30
- l'amélioration de la qualité de l'éducation
notamment dans l'enseignement fondamental;
- la promotion d'une politique de développement des ressources de
l'apprentissage;
- l'accroissement et la rationalisation de l'offre scolaire au
niveau de l'enseignement fondamental;
- le renouvellement académique et la rationalisation de l'offre des
services de l'enseignement secondaire;
- la coordination des dispositifs de soutien au développement global de
la petite enfance;
- la relance de la formation professionnelle et technique en soutien à
l'effort d'innovation technologique et à la recherche d'une
meilleure adéquation entre l'emploi et la formation etc.
Les données présentées en 1998 témoignent de
l'existence d'au moins 9558 écoles fondamentales (1er et
2ème cycles) contre 1 179 du 3ème cycle et du
secondaire. Le secteur public représente 11% de ces deux niveaux tandis que le
privé se situe autour de 89%31.
D'après les données de la Direction de la Planification du
Ministère, au niveau du préscolaire, on compte 431 centres publics en
1998 (contre 210 en 1993-94), tous attachés à des écoles
fondamentales. Le secteur privé totalise 6 211 centres en 2000 contre 1 018 en
1993-199432.
Dans le primaire, les élèves sont au moins aujourd'hui au nombre de
1 400 000 (ils étaient en 1998 341 076 dont 52% de filles contre 48% de
garçons). Les filles représentent 40% et les garçons 60%. Le
nombre des enseignants du primaire33
étant de 41170 dont 33% de sexe féminin contre 67% de l'autre sexe.
Aux niveaux du secondaire et du 3ème cycle, on dénombre, selon
les mêmes données de 1998, 1 170 écoles pour un effectif de 172 053
élèves (en 1998 ils sont passés à 327 978)34 de 12 à 18 ans.
Ces chiffres permettent de se rendre compte à l'évidence de la
très forte présence du secteur privé, donc des parents, dans les
investissements dans l'éducation. Cette situation s'explique par la
très forte demande sociale d'éducation pour une offre publique ne
pouvant y répondre que relativement. Néanmoins, ce
déséquilibre apparent ne permet pas de comprendre la somme
d'efforts déployés par l'État en vue de dynamiser le
secteur.
En effet, l'allocation budgétaire relative du Ministère de
l'Éducation Nationale se chiffre à 10% environ au regard du budget
général de la République d'Haïti en 1996-97. Elle suit
ainsi celles des Travaux Publics, Transports et Communications (22.99 %), de la
Santé Publique et de la Population (10.55 %) et des Interventions Publiques
(10.15 %).35 Selon les données du
Ministère, en 2000 l'enveloppe budgétaire allouée à
l'éducation représenterait 22% du budget national.
Les données sur les taux de scolarisation décrivent beaucoup mieux encore
la dynamique globale des interventions de l'État.. Durant la
période 1994-98, le taux net de scolarisation (enfants entre 6 et 11 ans) est de
6.7% contre 3.13% sous le coup d'État. Et si on fait une plus longue
projection, on constatera que durant ces vingt (20) dernières années, le
gain en matière de scolarisation brute pour le même groupe
d'âges se chiffre à 72% pour une scolarisation nette de 30%.
La tendance est la même au niveau du préscolaire : le taux brut de
scolarisation est de 19.7% en 1990 et de 64.3% en 1998, soit un gain de 44.6%. Le
secondaire accuse un taux de 5.8%.36
1.3.1. le rapport à la qualité et à l'efficacité
interne
En 1995, les études accusent un niveau généralement faible de
formation et de qualification des enseignants. Sur un échantillon de 2 000
enseignants du fondamental privé et défavorisé, les études
ont montré que ces derniers ne réalisent même pas la performance
correspondant au 3ème cycle de l'École fondamentale.37 En 1998, ils sont seulement 10% à
être des normaliens.38
Cette situation influe naturellement sur la capacité interne du système
et donne ainsi lieu à des problèmes importants de déperdition. Le
tableau suivant39 illustre le taux de
flux des élèves au niveau de l'enseignement fondamental pour
1997
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